Une courte histoire des fouilles

Ce n’est qu’à partir de 1948 que des fouilles furent entamées à Labraunda. Cette première opération est due à l’obstination du professeur suédois d’archéologie classique Axel W. Persson, de l’université d’Uppsala. S’appuyant sur des rapprochements entre le culte de la double hache et l’attribut de Zeus Labraundos, ce savant, spécialiste de l’Âge du Bronze en Grèce, était persuadé de trouver à Labraunda les éléments qui manquaient à la communauté scientifique internationale pour déchiffrer le linéaire B, syllabaire mycénien dont des tablettes furent mises au jour en Grèce continentale et en Crète.

Fouilles de l'andrôn B en 1948

Les premières campagnes de fouilles intervinrent entre 1948 et 1951, date à laquelle A.W. Persson disparut et fut remplacé par G. Säflund. La cadence des campagnes de fouilles devint alors moins régulière et, après la campagne de 1953, il fut décidé d’entamer la publication des rapports finaux des fouilles de Labraunda. Une dernière opération fut menée en 1960 par A. Westholm, dont l’objectif était de clore définitivement les fouilles et de remettre le site en état avant d’en transmettre la responsabilité aux autorités turques. Au terme de cette opération, on organisa donc une cérémonie officielle censée marquer la fin des fouilles suédoises à Labraunda.

Après la publication de cinq volumes de la série des Labraunda Swedish Excavations and Research, nombreuses furent les voix qui s’élevèrent pour réclamer une nouvelle série de courtes campagnes de vérifications de terrain afin de mener à bien l’étude des nombreux bâtiments qui avaient été mis au jour sur le site. C’est ainsi que de modestes opérations eurent lieu au cours des années 1979, 1983 et 1985. Loin de répondre aux attentes des chercheurs, et malgré la publication de quatre volumes supplémentaires, ces travaux démontrèrent la nécessité de reprendre de grandes campagnes de fouilles afin d’achever le dégagement des bâtiments les plus importants du site, notamment les différentes stoai, les andrônes A et B et le bâtiment des oikoi.
En 1987, les autorités turques accordèrent un premier permis de fouilles au Prof. P. Hellström, qui dirigea dès l’année suivante, sous les auspices de l’institut de recherche suédois à Istanbul, sa première opération à Labraunda. P. Hellström enchaîna ensuite les campagnes annuelles jusqu’en 1993, revenant de chaque expédition avec une moisson de données nouvelles et spectaculaires.

Après une ultime pause de huit années, les opérations reprirent en 2002, sous la direction de P. Hellström, d’abord, puis du Prof. L. Karlsson à partir de 2004. L’arrivée de celui-ci à la tête des fouilles de Labraunda marqua une étape décisive dans la connaissance du site. En effet, alors que les efforts sur le terrain avaient été concentrés jusqu’ici sur le centre monumental, L. Karlsson décida d’élargir les investigations archéologiques à la fois géographiquement, aux alentours immédiats du site, et chronologiquement, en incluant notamment la période byzantine. Il s’agissait d’acquérir une vision plus globale et diachronique du paysage archéologique du site. Les résultats ne se firent pas attendre et, s’ils restèrent moins spectaculaires que la fouille d’un temple d’époque classique, ils dépassèrent bien souvent les attentes.

Découverte du Sphynx de Labraunda en 1953

Bien que les premières recherches effectuées sur le site aient été le fait de scientifiques français (Ph. Le Bas en 1844 et A. Laumonier en 1932), ce n’est qu’en 2006 qu’un premier français participa aux fouilles du site, lorsque L. Karlsson invita O. Henry à conduire une étude des nécropoles du site. Cette participation a marqué le début d’une collaboration très fructueuse qui amena Lars Karlsson à lui proposer le poste de directeur de chantier en 2011. En 2012, le ministère français des Affaires étrangères soutint la demande de création d’une mission archéologique française à Labraunda. L’année suivante, souhaitant concentrer son activité sur ses charges universitaires, Lars Karlsson transmit à O. Henry la direction des fouilles. Cette décision fut entérinée en Conseil des ministres du gouvernement turc en juillet 2014, après une saison transitoire. Fin 2015, la mission archéologique de Labraunda obtenait le label de l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres pour l’année 2016. Ce label fut reconduit pour les années 2017, 2018 et 2019.

Les travaux menés sur le site de Labraunda se sont enrichis depuis l’année 2017 d’une mission de prospection qui permet de commencer à établir une véritable carte archéologique de la région, à partir d’un étude systématique du territoire. Cette prospection révèle la richesse historique de la région, avec des vestiges datant du Chalcolithique jusqu’à la fin de la période byzantine.